Laurent KAISER
Adjudant-chef de la Maison de Prévention et de Protection des familles de la gendarmerie du Finistère
Diplôme d’Université Adolescents Difficiles | Promotion 2022
Laurent KAISER est à la tête de la Maison de Prévention et de Protection des familles de la gendarmerie du Finistère. Cette unité a trois principales missions :
- La prévention auprès des publics et particulièrement des personnes vulnérables (mineurs, victimes de violences conjugales et intrafamiliales, personnes en situation de handicap, seniors)
- L’information et la formation des futurs professionnels de santé ou sociaux et des élus.
- L’appui judiciaire avec notamment l’audition de mineur victime de violences sexuelles ou de maltraitance.
En 2022, il a obtenu le Diplôme d’Université Adolescents Difficiles à l’Université de Bretagne Occidentale.
Retour sur son expérience de stagiaire de la formation continue…
La formation, l’Adjudant-Chef Laurent Kaiser connaît : « J’ai remarqué qu’il fallait absolument qu’on fasse des interventions pour présenter nos missions de protection auprès des mineurs. On parle du signalement, quels sont les signes de repères physiques et psychologiques de l’enfant qui est victime. Dans le cadre des violences conjugales, on fait la différence entre le conflit et la violence. On explique les notions de cercle et de cycle de la violence. Le fait d’apporter des exemples aux étudiants leur permet de mieux appréhender ces mécanismes, et de travailler leur posture professionnelle face à des dénonciations. »
Confronter ses pratiques professionnelles : « j’avais besoin de mieux comprendre l’adolescent. »
Laurent Kaiser a choisi de suivre cette formation parce que : « Même si on est formé aux auditions de mineurs, on ne pousse pas assez sur la psychologie et la pédopsychiatrie. Je voulais mettre des mots sur des choses que j’avais remarquées dans le cadre de mes fonctions. Cela a permis de valider certaines de mes perceptions et cela a amené d’autres réflexions qui m’ont été bénéfiques. En fonction des intervenants, on avait une vision très proche de ce qui se passe au quotidien et parfois des contenus qui permettaient de prendre du recul.
J’ai, par exemple, mieux compris les risques de basculement dans la délinquance et la nécessité de ne pas se focaliser que sur le mineur-auteur qui peut, également, être victime. On doit prendre le phénomène dans sa globalité pour pouvoir avancer, parce qu'il n’y a pas que le temps de l’enquête, il y a l’après aussi. »
Rencontrer ses pairs : « c’était vraiment une attente avant d’entrer en formation. »
« Dans le cadre de mes fonctions, je m’imagine un peu comme un dé à 5 faces. Je suis le point au milieu de plusieurs partenaires : la Préfecture, l’ODPE (Observatoire Départemental de Protection de l’Enfance), le Tribunal de Brest. Je suis également en lien avec « tout le milieu médical, la pédopsychiatrie de Bohars, l’Unité d’Accueil Pédiatrique Enfance en Danger, tout ce qui est éducatif : éducation nationale, enseignement privé, dîwân, associatif… »
Quand il est rentré en formation, Laurent Kaiser connaissait déjà la plupart des stagiaires : « ça permettait d’avoir un échange sur 2 jours, plutôt que pendant une réunion, c’est plus intéressant. Partager ses expériences pendant la formation fait évoluer les pratiques des uns et des autres : ce qui fonctionne, ce qui dysfonctionne, casser les représentations. Pour ma part, en tant que gendarme, j’ai pu présenter mon rôle et casser certaines perceptions sur mes fonctions : on ne pense pas forcément à nous attribuer la mission d’audition des victimes. À titre personnel, j’ai également pu intervenir sur la notion de transculturalité*, ayant passé 5 années en Guyane. »
Faire évoluer les méthodes de travail : « je voulais faire quelque chose qui servirait à mes collègues »
Laurent Kaiser avait bien l’intention de partager ses apprentissages avec ses collaborateurs. « On a étudié la théorie de l’attachement et le conflit de loyauté et grâce à ces connaissances, j’ai sorti une "fiche réflexe" pour améliorer les méthodes d’audition. Lorsqu’on entend un enfant dans le cadre d’une séparation, il faut savoir prendre du recul et ne pas prendre parti. Un fait très concret : il ne faut jamais demander à un enfant s’il veut déposer plainte contre l’un ou l’autre de ses parents. »
Pour obtenir le Diplôme d’Université Adolescents difficile, il faut rédiger et soutenir un mémoire, travail de recherche souvent demandé à l’Université. « J’ai fait un mémoire sur l’entretien judiciaire de mineur qui présente des troubles du spectre de l’autisme et qui est victime de violences sexuelles et de maltraitance. Avant d’attaquer la formation, je travaillais déjà sur ce thème avec des partenaires (Centres Ressources Autisme, ITES, des pédiatres, pédopsychiatres et psychologues, des associations, le Ministère de la Justice). Je m’étais rendu compte qu’il était difficile d’entendre un enfant autiste. On ne le fait pas du tout comme un enfant qui n’a pas ces troubles. Faire ce D.U. m’a permis de prendre du temps pour faire cette recherche, d’y consacrer un vrai temps de travail et de la faire aboutir. »
Pour conclure, Laurent Kaiser souligne l’importance de la formation professionnelle : « Il ne faut pas hésiter à se former, à n’importe quel âge. C’est aussi une satisfaction personnelle. »
*Transculturalité : Les valeurs et normes portées par les professionnels, par référence au métier exercé et à l'institution auquel ils appartiennent (milieu scolaire, hospitalier, judiciaire, de l'éducation spécialisée...) nourrissent les différences constatées dans les pratiques d'accompagnement et les difficultés à coopérer. La transculturalité implique un dépassement des pratiques habituelles et des conflictualités sous-jacentes dans la perspective d'instituer des accompagnements plus cohérents en direction des adolescents difficiles.