Dépoldérisation Programmée de petits Marais littoraux (DPM)
- Responsable scientifique du projet : Célia Dèbre, Sébastien Gallet, Julien Pétillon
- Durée du projet : Janvier 2021 - Décembre 2024
- Budget Global (synthèse) : 190 000 euros
- Financeurs : Fondation de France et Conservatoire du littoral
- Chercheurs du laboratoire impliqués :
- Marion Bourhis
- Xavier Dauvergne
- Célia Dèbre
- Sébastien Gallet
- Florence Gourlay
- Manuel Simon
- Autres laboratoires impliqués :
- ECOBIO
- BOREA
- Partenaires :
- Réserve Naturelle Nationale de la Baie d’Aiguillon
- PNR du marais poitevin
- Fédération de chasse du Morbihan
- Lorient Agglomération
- OFB
- RNCFS Golfe du Morbihan
- RNN des marais de Séné
- RNN de la Baie de Saint Brieuc
- Département de l’Ile et Vilaine
- Forum des Marais Atlantiques
L’aménagement des espaces littoraux a été dominé pendant des siècles par la construction d’ouvrages séparant la terre de la mer, notamment pour protéger les populations des submersions marines (Guerrin, Bouleau, 2014). La politique d’assèchement des marais arrières-littoraux a aussi largement été justifiée par les maladies endémiques transmises par les moustiques de ces zones Dans les marais littoraux, de tels ouvrages ont le plus souvent également permis de soustraire des terres à l’influence de la marée, en particulier pour y développer des activités agricoles. Or, ce « gain » de terres sur la mer est de plus en plus remis en question pour des raisons économiques (déprise agricole et spécialisation touristique des littoraux) mais aussi environnementales : d’une part du fait du passage d’un principe de défense à celui d’adaptation pour lutter contre les submersions et d’autre part via la reconnaissance de l’importance de la biodiversité et de la fonctionnalité écologique des marais littoraux. La « dépoldérisation » qui permet la remise en eau ou reconnexion à la mer de ces espaces est donc une manière de répondre aux objectifs de gestion du littoral tant pour la préservation d’espaces naturels littoraux que pour la lutte contre les risques de submersion (Goeldner-Gianella, 2013). Un certain nombre de sites sont concernés aujourd’hui par une dépoldérisation programmée notamment car s’impose à leurs gestionnaires l’application de cadres réglementaires dont la loi-cadre européenne sur l’eau, la loi sur l’eau et les milieux aquatiques (LEMA) ainsi que les schémas Directeurs d’Aménagement et de Gestion de l’Eau (SDAGE) pour la restauration des continuités écologiques des cours d’eau. Si des telles approches ont depuis plusieurs années été développées en Europe occidentale (notamment en Angleterre et aux Pays-Bas : Wolters et al. 2005), la France manque cruellement d’éléments scientifiques, socio-économiques comme écologiques, sur le succès de ces dépoldérisations.
Situés à l’interface terre-mer, les marais salés jouent un rôle important dans la préservation de la qualité des eaux côtières, et sont eux-mêmes souvent sous l’influence de la qualité des eaux continentales. Les végétations des marais et prés salés sont identifiées comme habitats d’intérêt communautaire par la directive européenne Habitat, Faune, Flore. Ils font également partie des milieux pris en compte par la convention de Ramsar. Soumis à de fortes pressions ou dégradations, notamment liées à des opérations de poldérisation, la restauration de ces milieux est un enjeu important en termes de biodiversité et de fonctionnalité de la trame verte littorale mais aussi d’adaptation face aux changements climatiques et à leur conséquence sur le littoral. Face à la complexité de la mise en place d’actions de restauration sur les grands marais salés, les « petits » systèmes de marais pourraient présenter un potentiel important à prendre en compte.
Dans une première phase de nos travaux de recherche, le programme PEPPS (Pertinence Environnementale de la restauration des Petits marais et Prés Salés ; 2019-2021) s’intéresse à des sites dont pour la plupart la dépoldérisation est ancienne et permet de retracer les trajectoires écologiques et les dynamiques sociales à moyen et long terme. Dans le prolongement de ce programme initial, ce nouveau programme (DPM - PEPPS 2), va se concentrer exclusivement sur le temps court de ces dépoldérisations : le « juste avant » et le « juste après ». En effet, les premiers résultats du programme PEPPS tendent à montrer que ces temps de la reconnexion semblent être des moments clés tant pour la dynamique écologique que pour les représentations sociales de ces transformations qui peuvent être parfois brutales. Il s’agit d’analyser les temporalités de la renaturation suivant le type de dépoldérisation envisagé, allant d’une simple reconnexion à la mer par une ouverture de clapets à une dépose de digues ou à des déblais. En parallèle d’une approche écologique (biodiversité structurale : végétation, poissons, arthropodes, et fonctionnelle : réseau trophique et connectivité), ces différents types de dépoldérisation ayant un impact très variable sur les paysages et les usages, seront également analysés leurs effets sur les représentations des sites étudiés. L’objectif est ainsi, sur la base d’une meilleure connaissance du fonctionnement des petits marais littoraux et des représentations sociales de la dépoldérisation, de fournir des outils d’aide à la décision et à la gestion des opérations de dépoldérisation ou de reconnexion à la mer à venir et ainsi d’accompagner les gestionnaires face aux impératifs tant réglementaires, sociétaux et d’adaptation auxquels ils doivent faire face.
A cet effet, nous nous intéresserons ainsi à des sites du littoral armoricain pour lesquels la dépoldérisation est programmée entre 2020 et 2022 afin de permettre la réalisation d’un état des lieux pré-reconnexion et l’analyse des effets écologiques et sociologiques immédiats de la reconnexion. La proximité des sites et des différents partenaires favorisera de plus le travail de terrain et une efficience du partenariat en matière d’échanges et de réalisation des tâches.
Fort de l’expérience d’un premier programme PEPPS, ce projet en reprend les approches méthodologiques pluridisciplinaires qui en ont fait le succès. Il articule plusieurs approches disciplinaires éprouvées pour développer une connaissance fine de ces milieux et pour analyser de façon transversale : les rôles et fonctionnalités des petits prés salés et leur intégration à la trame verte littorale ; les dynamiques de restauration de petits systèmes de schorre anciennement poldérisés ; les pratiques et représentations sociales de ces sites et les enjeux socio-économiques liés à ces petits marais salés et à leur restauration. Ce programme a des objectifs plus opérationnels que le programme PEPPS et les connaissances acquises devront permettre de développer des outils d’aide à décision, tant pour les sites étudiés que pour les porteurs de projet de dépoldérisation à venir.