Étudier le rire des épistoliers du XVIe au XVIIIe siècle participe de l'écriture de l'histoire des émotions qui connaît actuellement un grand essor. Cependant, alors que de nombreux travaux universitaires ont été consacrés au rire, aucun ouvrage à ce jour n'a été entièrement consacré au rire des épistoliers. Comment les émotions individuelles se relient-elles aux émotions collectives ? Entre rhétorique et exercice de la parole individuelle, le rire des épistoliers en tant que pratique culturelle et sociale se situe à la croisée de différents champs, notamment ceux de l'histoire, de la sociabilité et de la littérature. À première vue, l'épistolier peut trouver dans la brièveté de la lettre, le lieu privilégié de l'expression du bon mot et du bel esprit qu'il partage avec son correspondant, mais la tâche est d'autant plus ardue pour le chercheur qui s'intéresse au rire de l'épistolier que les manuels épistolographiques de l'Âge classique se méfient du rire et de ses usages. Le rire met la lettre sous tension, entre proximité et distance, entre respect des convenances et choix du ton, entre travail, naturel et familiarité. Le rire de l'épistolier relève bel et bien d'une poétique de l'effet que le concept d'écho épistolaire permet de saisir pleinement.