« Jusqu’au bout ? L’effondrement des ressources marines de la rade de Brest (XVIIIe – fin XXe siècles) »

Le
Laboratoire LEMAR
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Le 4 décembre prochain, Lucas Bosseboeuf, doctorant au laboratoire des sciences de l'environnement marin (LEMAR) de l’UBO, soutiendra sa thèse sur "Jusqu’au bout ? L’effondrement des ressources marines de la rade de Brest (XVIIIe – fin XXe siècles)".

La thèse de Lucas Bosseboeuf part d’un constat sans appel : les principales ressources marines de la rade de Brest, se sont effondrées. Comment se fait-il que les huitres plates, si appréciées et abondantes jusqu’au XIXe siècle, aient totalement disparu ? Pourquoi les coquilles Saint-Jacques ont-elles emprunté la même trajectoire ? Est-ce lié à des conditions météorologiques particulières, des maladies ou bien à une surexploitation ? Quels sont les leviers pour contribuer désormais à préserver les ressources ?

Le saviez-vous ? En 2019, un projet de recherche interdisciplinaire et participatif, nommé HistoRade a été lancé et soutenu par la Zone Atelier Brest-Iroise autour d'un double objectif : étudier l’histoire environnementale, encore méconnue, de la rade de Brest et analyser les relations entre les gens de la rade et la nature (terrestre et maritime).

> En savoir + : https://historade.fr/

Depuis 2021, Historade a pris la forme d’une thèse, menée par Lucas Bosseboeuf, dirigée par Philippe Jarnoux, professeur en histoire au CRBC, et Yves-Marie Paulet, professeur en biologie marine au LEMAR.

> En savoir + sur le LEMAR : https://www-iuem.univ-brest.fr/lemar/

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Un effondrement de l’écosystème de la rade de Brest depuis le milieu du XIXè siècle

Cette étude part d’un constat actuel : les principales ressources marines de la rade de Brest se sont effondrées. L’objectif principal de cette étude menée par Lucas Bosseboeuf est de comprendre comment nous en sommes arrivés là.

Ainsi, les huîtres plates, qui concentrent toutes les attentions jusqu’au XIXe siècle, s’effondrent en 1857. Quasiment à la même période, les coquilles Saint-Jacques brestoises prolifèrent et viennent consoler les pêcheurs. Cependant, cette ressource s'appauvrit, et suite à la campagne de l'hiver 1962-1962, un hiver particulièrement glacial, le stock ne se maintiendra qu'à l'état de relique. Comme un réflexe, les gens de mer dirigent leurs dragues vers les bancs de praires et de pétoncles. Toutefois, les stocks sont insuffisants et l’activité décline rapidement.

Face à la dégradation de l’état de santé de la rade, les pêcheurs s’organisent, dès 1950, pour se reconvertir à l’ostréiculture. Ils gèrent collectivement des concessions en eaux profondes et intertidales, pour maîtriser toutes les phases de la production des huîtres plates (captage du naissain et élevage des huîtres). Pourtant prometteuse, cette activité est stoppée par l’arrivée du parasite Marteilia refringens, décimant les huîtrières brestoises.

Comment comprendre le mécanisme de cet effondrement ?

L’analyse des archives nous permet de mieux comprendre le mécanisme de ces effondrements. Même si des études complémentaires doivent être menées pour estimer les effets des pollutions industrielles dans la dégradation de l’état de santé de la rade, il est clair que l’impact de l’activité de pêche ne doit pas être sous-estimé. Bien souvent, des pratiques destructrices (dragues), la dégradation des habitats marins et la surexploitation des bancs ont conduit les gisements vers l’épuisement. Surtout, ces archives documentent le comportement humain face à l’effondrement

Que nous apprend cette étude ?

Que ce soit dans l’attentisme, dans la volonté de restaurer les fonds sinistrés, ou bien dans l’exploitation du milieu marin, les gens de la rade sont allés jusqu’au bout. Surtout, ils ne sont pas parvenus à restaurer les gisements. Ces dégradations sont irrémédiables ou bien s'inscrivent dans le temps long de la restauration écologique. Cela prouve s’il le fallait, que le film de la dégradation ne se joue pas si aisément en arrière même lorsque les pressions se relâchent.

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Tri des coquilles Saint-Jacques par des pêcheurs de la rade de Brest (1940-1950).
Musée de la fraise et du patrimoine